- EAN13
- 9782228915045
- Éditeur
- FeniXX réédition numérique (Payot & Rivages)
- Date de publication
- 1980
- Collection
- Critique de la politique Payot
- Langue
- français
- Langue d'origine
- français
- Fiches UNIMARC
- S'identifier
L'imaginaire philosophique
Michèle Le Dœuff
FeniXX réédition numérique (Payot & Rivages)
Critique de la politique Payot
Livre numérique
Il est de notoriété publique que les philosophes rêvent parfois. Quand ils
nous donnent des nouvelles d'îles où le vent ne souffle pas ; quand ils
esquissent une topographie insolite du corps féminin ; quand le timbre de la
voix parlante leur paraît une menace pour la sécurité de l'État..., par
exemple. Si bien que Condillac soupçonnait ses confrères de créer leurs
systèmes dans leur lit. Traditionnellement, on peut imputer ces bizarreries à
un fond archaïque, chargé de mythologie populaire, qui ferait retour, malgré
la discipline, dans le champ du travail théorique ; on peut aussi comprendre
ces allégories comme des illustrations proposées par le philosophe pour rendre
son discours plus accessible ; on peut, enfin, passer délibérément à côté et
n'en rien penser du tout : autant de façons, finalement, de répondre au vœu
même de la philosophie, qui toujours travaille à protéger ses images contre
toute tentative d'analyse. Mais pourquoi faudrait-il donc ne pas y regarder de
trop près ? Serait-ce que ces arbres, ces logis, ces affinités alchimiques,
ces fictions utopiques, ces femmes-plantes baignant dans l'air du temps,
auraient à voir avec les tensions, les échecs, les difficultés d'une
entreprise philosophique qui ne serait jamais à la hauteur de ses propres
normes de validation ? Un écart dans le projet philosophique lui-même — un
espace comblé d'images ad hoc — au bout du compte un imaginaire philosophique.
nous donnent des nouvelles d'îles où le vent ne souffle pas ; quand ils
esquissent une topographie insolite du corps féminin ; quand le timbre de la
voix parlante leur paraît une menace pour la sécurité de l'État..., par
exemple. Si bien que Condillac soupçonnait ses confrères de créer leurs
systèmes dans leur lit. Traditionnellement, on peut imputer ces bizarreries à
un fond archaïque, chargé de mythologie populaire, qui ferait retour, malgré
la discipline, dans le champ du travail théorique ; on peut aussi comprendre
ces allégories comme des illustrations proposées par le philosophe pour rendre
son discours plus accessible ; on peut, enfin, passer délibérément à côté et
n'en rien penser du tout : autant de façons, finalement, de répondre au vœu
même de la philosophie, qui toujours travaille à protéger ses images contre
toute tentative d'analyse. Mais pourquoi faudrait-il donc ne pas y regarder de
trop près ? Serait-ce que ces arbres, ces logis, ces affinités alchimiques,
ces fictions utopiques, ces femmes-plantes baignant dans l'air du temps,
auraient à voir avec les tensions, les échecs, les difficultés d'une
entreprise philosophique qui ne serait jamais à la hauteur de ses propres
normes de validation ? Un écart dans le projet philosophique lui-même — un
espace comblé d'images ad hoc — au bout du compte un imaginaire philosophique.
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